Quel potentiel pour les énergies citoyennes en France ?
Une communauté d’énergie citoyenne (CEC) représente un groupement de citoyens, accompagné ou non par des acteurs publics/privés, qui décident d’investir ensemble dans un projet de centrale d’énergie renouvelable. Les CEC peuvent prendre la forme de grappes solaires (panneaux photovoltaïques installés par exemple sur le toit de l’école et de la salle polyvalente de la ville), la rénovation de la turbine hydroélectrique du village qui ne fonctionne plus depuis longtemps ou encore, un champ d’éoliennes !
Ces communautés se caractérisent le plus souvent par un mode de gouvernance très démocratique basé sur le principe « un homme, une voix » : peu importe le nombre d’actions détenues par chaque sociétaire, il aura le même accès à la gouvernance de la communauté. L’idée principale est donc ici de montrer qu’il est possible pour les citoyens de « reprendre la main » sur l’énergie et de rendre visibles ces projets. Pour cela, l’association nationale des CEC Énergie partagée ou encore l’association Centrales villageoises qui œuvre dans l’Est de la France, sont là pour accompagner et fédérer cette démarche. En octobre 2020, Énergie Partagée recensait 204 projets d’énergies citoyennes sur le territoire français, dont plus d’un quart en Auvergne-Rhône-Alpes. Ce nombre a été multiplié par 4 en moins de 5 ans.
En plus de cet investissement participatif et collectif de la part des citoyens, les CEC disposent de plusieurs mécanismes d’aides disponibles au niveau national (comme les tarifs d’achat ou le « bonus participatif ») ou régional (agences dédiées, subventions fléchées pour ces communautés…) qui ont rendu possible l’émergence de ce mouvement. Mais l’évolution des dispositifs d’aide (notamment des tarifs d’achat) met actuellement en péril certaines communautés, notamment les plus petites. Les responsables politiques devraient considérer les CEC comme un outil puissant de mobilisation des citoyens en faveur de la transition énergétique, reconnaître leur rôle multiple et favoriser leur déploiement.
Leçons des initiatives locales de sobriété énergétique
Au-delà de développer toujours plus de renouvelable, l’urgence climatique va nous demander d’organiser une société plus sobre en énergie. C’est d’ailleurs ce que préconise la Convention citoyenne pour le Climat dont la première thématique de propositions concerne les changements de consommation. La sobriété énergétique est définie par l’association Virage Énergie comme une démarche qui vise à réduire les consommations d’énergie par des changements de comportement, de mode de vie et d’organisation collective. Aujourd’hui, la sobriété énergétique se concrétise principalement par des petits gestes individuels des citoyens sensibles aux enjeux environnementaux (par exemple faire du covoiturage ou réduire sa consommation de viande). Cependant, pour être à la hauteur des enjeux environnementaux, il faut une réorganisation collective. À ce jour, quelques initiatives locales de sobriété énergétique existent notamment à Aubenas, Grenoble, Dunkerque, Malaunay ou Ungersheim.
Nous pouvons tirer plusieurs leçons des expériences de ces ville pionnières. Tout d’abord, ces initiatives émergent dans des territoires avec des démarches volontaristes sur le climat et l’énergie. Pourtant même si l’ambition existe, les acteurs ont souvent des difficultés à opérationnaliser ce qu’une démarche de sobriété énergétique collective pourrait être concrètement. Et lorsqu’un projet concret émerge, les acteurs qui y participent sont nombreux, hétérogènes et pourtant complémentaires. Pour que les initiatives de sobriété énergétique puissent se réaliser, il faut parvenir à aligner les intérêts de chacun. Pour cela un rôle rarement mis en avant mais indispensable ressort : celui de l’animateur transversal. À Aubenas par exemple, ce rôle rempli par l’animatrice du centre social a été primordial pour écouter tous les acteurs, comprendre leurs besoins, entretenir le lien social, et apaiser les conflits.
Enfin, la sobriété énergétique est un projet sociétal qui implique de repenser nos usages de manière fondamentale. L’énergie n’est pas une fin en soi mais rend possible de nombreux usages (éclairage, chauffage, froid, mobilité, etc.). Réfléchir en termes de sobriété c’est identifier les usages que l’on souhaite prioriser et ceux que l’on doit abandonner. Faire de tels choix n’est pas anodin et pour être compris et acceptés, il est nécessaire de trouver de nouvelles formes de démocratie participative permettant de donner une voix à toutes les parties prenantes.
l'article de Stéphane Labranche et Julien Robillard paroles de GEM "Familles à énergie positive", le défi qui donne envie de faire des économies d'énergie