Mobiliser nos imaginaires
Notre hypothèse était que les imaginaires n’avaient pas été suffisamment sollicités et libérés dans la recherche de solutions innovantes pour une ville énergétiquement neutre. Le paradoxe étant que, malgré l’accumulation de savoir-faire de grande qualité et d’expériences riches en enseignements, les transitions énergétiques engagées n’étaient ni aussi rapides, ni assez « en rupture » pour être à même de répondre aux objectifs climatiques et en particulier, celui de la neutralité carbone au plan national en 2050. Pour rompre avec cette logique, il fallait mobiliser les imaginaires d’une promotion d’étudiants en urbanisme et projets urbains. Cela en leur laissant toute liberté pour répondre aux questions d’un groupe d’acteurs, urbanistes, aménageurs et de chercheurs du territoire grenoblois. Le cadre fut celui d’un cycle de rencontres sur le thème des « Utopies et réalités énergétiques » organisé en partenariat entre la SFR Territoires et l’Agence.
Partir de questions ouvertes
Dans un schéma de communication inversée, visant à garantir la liberté de pensée des étudiants, acteurs et chercheurs ont été amenés à poser des questions aux étudiants et uniquement des questions. Les thèmes proposés étaient au nombre de trois : "Sobriété et précarité", "Ressources et intelligence énergétique", "Cités nomades". Ils répondaient aux problématiques en cours sur le territoire grenoblois et ils prenaient en considération : les travaux du Club Énergie de la Fédération nationale des agences d’urbanisme (Fnau) ; le projet sur les cités nomades mené en Résidence Arts-Sciences ; la chaire Hope de la Fondation Grenoble INP sur la précarité énergétique ; et les travaux des différentes unités de recherche, membres de la Structure Fédérative de Recherche - Territoires de l’Université Grenoble-Alpes.
L’énergie comme bien commun
Cette expérience pédagogique originale a ainsi permis de construire un regard nouveau sur les défis actuels des transitions énergétiques et écologiques. Dans tous les dossiers, les étudiants se sont attachés à poser avec constance l’énergie comme un bien commun. Ils ont interrogé notre capacité à anticiper et à imaginer une action collective afin que chacun puisse avoir accès à l’énergie dans le respect des contraintes environnementales. Néanmoins, ils sont restés dubitatifs sur les conséquences d’une éventuelle diminution des ressources. Mènerait-elle à plus de solidarité ? Produire localement de l’énergie serait-il plus équitable que l’actuel modèle centralisé ? Ou la production locale génèrerait-elle plus d’inégalités ? Enfin, une "transition énergétique réelle", serait-elle compatible avec tous les systèmes politiques ? Et en particulier la démocratie ?
En valorisant les imaginaires des étudiants, leur capacité à identifier de nouvelles solutions, leurs indignations et leurs observations candides aussi, vis-à-vis de la société, cette expérience a permis de construire des liens intenses entre étudiants, chercheurs et acteurs territoriaux. Elle a offert une nouvelle forme de diffusion et de valorisation de la production universitaire en associant savoirs scientifiques et expertise opérationnelle. Étudiants, acteurs et chercheurs ont construit collectivement de la connaissance et nourri conjointement leurs imaginaires. Ils ont ainsi contribué à un renouvellement des utopies et à une réactualisation des savoirs requis dans les métiers de l’urbanisme et de l’aménagement des territoires.