Explorer le “mythe grenoblois”
Conçue comme une invitation à la réflexion, cette rétrospective pose la question des fondements narratifs de ce “mythe grenoblois” tout en mettant en lumière ses développements et son actualité. Quelles en sont les origines narratives, les personnalités emblématiques et les principales réalisations ? Comment cette dynamique de ville laboratoire a-t-elle évolué ? Et enfin, quel regard porte-t-on aujourd’hui sur cette notion issue des années 60-70 ? Cartographies, photographies et vidéographies notamment issues des archives municipales ou du Musée Dauphinois côtoient des créations contemporaines et fabriquent le portrait d’une métropole qui se réfléchit en retraçant à travers les décennies les liens qui unissent la ville et sa mise en récit.
Une exposition en trois temps
Le premier temps de l’exposition nous immergeait dans le contexte grenoblois des années 1960-1970 à la recherche des origines textuelles, architecturales, projectuelles, du mythe. Le deuxième, représenté sous la forme d’une longue frise chronologique réalisée par les étudiant·e·s avec l’aide de Marion Boucharlat – graphiste, restituait, depuis ces fondements, certaines évolutions et moments ayant marqué la vie grenobloise depuis 50 ans. Le mythe y est alors questionné à l’épreuve du réel. Enfin, pour le troisième, c’est en promenade que nous sommes partis, en suivant les pas et les mots d’un des témoins majeurs de l’évolution grenobloise : Pierre Frappat qui nous amène à la fois à travers Grenoble et à travers ses souvenirs d’une ville en pleine transformation.
Grenoble 1928, 1975, 2019 : les films
L’exposition était introduite par une séance de projection cinématographique, en partenariat avec la Cinémathèque de Grenoble. Ces trois films courts avaient pour sujet principal la métropole grenobloise mais filmée à différentes époques. Le premier, sobrement intitulé Grenoble, est un portrait sensible de la ville réalisé en 1928. Le second porte sur L’urbanisation des campagnes et date de 1975. Le troisième, réalisé par Naïm Aït-Sidhoum dans le cadre-même du programme de recherche, est une création contemporaine qui revisite les deux films précédents tout en proposant sa propre traversée de Grenoble en 2019. Ces trois films, espacés entre eux de 50 années, composent un portrait inédit de la métropole grenobloise et esquissent l’amorce d’un débat, d’une rétro-prospective.
Du mythe à la réalité
Parmi d’autres singularités, la ville connaît dans les années 60 des records de croissance démographique et des mutations notables sur le plan économique. Les sixties grenobloises se caractérisent également par la victoire d’une liste de gauche atypique aux élections municipales de mars 1965, qui inaugure presque deux décennies d’une politique urbaine inédite. Portée par un fort écho médiatique, l’image s’impose ainsi d’une « ville pilote » (Glayman, 1967), laboratoire et « vitrine de la France » (Paris Jour 1968), dont le rayonnement international s’accroît grâce à l’accueil des Jeux olympique d’hiver. « La voici devenue cité internationale, agglomération de l’énergie industrielle, refuge de la démographie consolante, perle de l’université réconciliée avec la technique. Et les Jeux Olympiques la sacrent capitale. » (Dubreuil, 1968)
Le récit grenoblois, ainsi durablement constitué, se compose de paysages alpins hivernaux, d’une jeunesse sportive, d'un urbanisme novateur, d'un socialisme municipal progressiste, d’un terreau industriel riche et plus généralement d'une vocation de « laboratoire », que les municipalités successives ne cesseront de cultiver.
Toutefois, certains observateurs ont pointé très tôt la part d’exagération, d’embellissement ou d’occultation de réalités moins glorieuses dans ce récit grenoblois (Dubreuil, 1967). Au terme de la décennie 1970, pour Pierre Frappat, Grenoble aurait même « perdu sa singularité » (Frappat, 1979) et le mythe n’aurait plus la consistance de naguère.
Dubreuil Dominique, « Grenoble, ville-test », Population, 23ᵉ année, n°4, 1968, pp. 780-781 Frappat Pierre, Grenoble, Le mythe blessé, 1979, Paris, Alain Moreau, p. 517 Glayman Claude, 50 millions de Grenoblois, 1967, Paris, Robert Laffont
télécharger la frise de l'exposition. Partie 1 : 1964-1983
télécharger la frise de l'exposition. Partie 2 : 1964-1983
vidéo de l'exposition Grenoble, métropole Laboratoire?, 2020 réalisation de l'exposition